Le chameau, le lion, l’enfant

Une découverte. Quelques lignes dans la horde du contrevent d’Alain Damasio (excellent roman, sans doute le plus prenant que j’aie lu depuis des années !) qui avaient curieusement tinté en moi.

« Qu’est ce qui est lourd? demande l’esprit qui respecte et qui obéit, que je puisse, en héros, en bon hordier, porter les plus lourdes charges ». Ainsi parle le chameau. (…) Et solidement harnaché, il marche vers son désert et là il devient lion. Devant lui se dresse le dragon des normes millénaires et sur chacune de ses écailles brillent en lettres d’or ces valeurs et ces mots: « Tu dois. » mais le lion dit: « je veux! » – sauf qu’il ne sait pas encore ce qu’il peut bien vouloir, il n’a fait que se chercher un dernier maître pour le contredire, que se rendre libre pour un devenir qu’il est encore incapable d’incarner. Alors survient la troisième métamorphose : le lion devient enfant. Innocence et oubli, premier mobile, roue qui roule d’elle même, recommencement et jeu et l’enfant dit « je crée ». Ou plutôt il ne dit plus rien : il joue, il crée. Il a trouvé son Oui, il a gagné son monde.

Ces trois métamorphoses peuvent être les étapes d’une vie, d’un amour, d’une quête – mais tout aussi bien coexister en toi en ce moment même, à différentes vitesses et proportions, en couches fondues.

– Le chameau, le lion, et l’enfant?
– « Tu dois », « Je veux », « Je crée » : les trois métamorphoses. Le hordier obéissant, puis le hordier révolté qui se libère, puis l’enfant retrouvé, à force de courage adulte, et qui crée sa voix, et qui la fera entendre.

La horde du contrevent, Alain Damasio
Et aussi : Les trois métamorphoses, Friedrich Nietzsche

Pleine lune demain à 12h44

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