Daily Archives: 17 août 2008

Du bon usage de la vénération

Lors de ma première expérience de soumission, il y a déjà un certain
nombre, voire maintenant un nombre certain d’années, il m’est arrivé quelque
chose de vraiment étrange.

C’était tout à la fin de la séance, elle m’avait attaché les
poignets à un palan suspendu au plafond de la pièce, et donné dix coups de
cravache que j’avais dû compter un à un en la remerciant à chaque fois. Ils
n’étaient pas très forts, c’étaient presque des caresses en fait… C’était une
Dame très respectueuse qui avait intégré le fait que je débutais. Elle voulait simplement
me donner un aperçu de ce qu’est le SM afin que je puisse décider si cela me
plaisait et si oui ou non je voulais aller plus loin dans cette voie.

Bon bien sûr pour vous qui me lisez maintenant et connaissez
la teneur de ce blog il n’y a pas de suspense… vous savez bien ce que j’ai pensé
de cette séance… Mais je vous assure que quand on débute en soumission
(et je suppose que c’est pareil en domination) ça n’a rien de simple. Déjà on n’a pas la moindre idée de ce que l’on a vraiment dans le
ventre, de la façon dont on va réagir en passant du fantasme à la réalité, et puis surtout c’est super flippant de se dire qu’on va se laisser
aller entre les mains d’une personne que l’on connaît à peine… un peu comme la première fois qu’on plonge du rebord d’un pont, avec un élastique noué autour des chevilles… Et la vérité c’est
qu’avant ma première expérience je n’en menais pas large du tout et que j’avais
parcouru les 1000km qui me séparaient du donjon de ma première Maîtresse en
tremblant comme une feuille d’un bout à l’autre du trajet… Ce qui m’arrive
d’ailleurs encore assez régulièrement lors d’une rencontre il faut bien le dire…
Je dois être un peu émotif ;-).

Etant en outre d’un naturel conciliant j’avais au cours de cette fameuse première séance docilement
compté ses coups de cravache sans omettre de la remercier à chaque fois. Au
début je me sentais un peu bête, mais au fur et à mesure de l’avancement de la séance je me suis surpris à
réaliser que chacun de mes remerciements était absolument sincère et venait du
plus profond de mon être. C’était assez étrange, pour un jeu qui somme toute était
finalement assez anodin.

Quand ce fut fini elle m’a détaché les mains et ordonné de
me mettre à quatre pattes devant elle. A ce stade je préfère jeter un voile
pudique sur ce qui s’est passé après qu’elle soit passée derrière moi… disons
simplement que ce fut la première fois…
 Mais lorsqu’elle eut fini et que je me suis
trouvé vidé et tout tremblant à ses pieds, elle est revenue se planter juste en face
de moi, me dominant de toute sa hauteur dans sa robe noire toute simple, et montée
sur ses chaussures de ville à talons… et m’a dit de faire la première chose
qui me passerait par la tête. Aujourd’hui encore je m’étonne de ma réaction à
ce moment là. Ce fut viscéral, animal, totalement instinctif. Je me suis allongé
sur le sol à ses pieds, j’ai pris ses chevilles entre mes mains, et lui ai
léché les pieds comme si ma vie en dépendait. Ce fut un instant d’abandon total
et, quelque part, une renaissance aussi, car ce jour là j’ai su que j’avais
trouvé ma voie... ou une voie disons ;-)

C’était aussi un instant de vénération profonde, pendant
lequel je n’étais plus qu’un élan tendu vers elle, pour elle. L’a-t-elle
senti à ce moment là ? Je le crois. Je l’espère. Car je n’ai plus jamais
eu de ses nouvelles après cette expérience. Elle ne m’a pas manqué car je
savais que ce serait une rencontre sans lendemain, mais j’ai souvent repensé à
ce moment par la suite…

 

 

Bizarrement il m’a fallu très longtemps avant de commencer à m’interroger sur les origines de ce que j’avais éprouvé à ce moment là.

Je crois qu’il y avait une immense gratitude pour ce qu’elle
m’avait donné la chance de vivre, et pour le plaisir qu’elle m’avait donné.
C’était aussi une façon de reconnaître sa suzeraineté, de lui dire « vous
êtes ma Maîtresse, et en cet instant je me donne entièrement à vous et ne suis que pour vous servir et vous donner du plaisir »

Et il y avait une troisième chose enfin, quelque chose de
plus profond, quelque chose qui était de l’ordre de la communion, d’un rituel
de partage, d’un besoin atavique de se sentir relié à l’autre. J’aime beaucoup
ce mot de communion. C’est ce qu’il y a de plus beau je trouve dans le SM, et
d’ailleurs dans l’érotisme en général, parce que, entre nous, j’aime bien aussi
faire l’amour « normalement » (mais shhhht je vous ai rien
dit hein ;-). Je vois l’acte amoureux un peu comme les Chinois des temps jadis : une cérémonie où se mélangent le ying
et le yang pour déboucher sur une sensation de plénitude et de régénération.

Pour moi ce sentiment de vénération n’est qu’une façon un
peu particulière de procéder à ce rituel de communion, uniquement réservé aux bons auspices d’une Dame qui l’apprécie, quel
intérêt autrement ?

J’entends parfois parler de « subspace » depuis
que je me promène à nouveau sur le net SM (cf. comment j’ai
redécouvert la planète cyber SM
pour savoir comment j’y suis revenu ;-).
Je ne sais pas si le « subspace » a un rapport avec ce dont je vous parle car je découvre
seulement ce concept, qui est neuf pour moi. A creuser donc… Et d’ailleurs si
vous avez un avis sur le sujet… ;-).

J’ai connu deux façons de pratiquer la vénération. L’une qui
est consciente et que j’assimile un peu à un réflexe pavlovien, lorsqu’on se
répète intérieurement « je vous appartiens, je vous appartiens, je vous appartiens… »
Comme si on voulait se convaincre soi même de l’existence de quelque chose
qu’on ne ressent pas vraiment, ou plus… et qui agit comme une forme d’auto-intoxication. J’en parle ici car je l’ai vécu, en me rendant à des rendez vous dans le cadre d’une relation qui a fini un peu
plus tard… Ce qui m’amène a penser que quand on ressent ça il faut le prendre
comme un sérieux signal d’alarme sur la relation.

Il y a une seconde façon de procéder, que je trouve très belle car elle se situe dans la légèreté et la fluidité, et qui
consiste, lorsque l’on vit un très beau moment, à lâcher prise, à cesser de penser à ce que l’on est en train de faire
pour devenir totalement acteur de son rôle. Dans ces moments là on s’en remet totalement à l’autre. C’est toujours une expérience assez intense,
car en ce qui me concerne j’ai a chaque fois l’impression de larguer les
amarres pour un voyage sans retour, pourtant passé le premier moment de
flottement je me rends assez vite compte qu’il y a une sorte de « pilotage
automatique » qui se met en place et que fondamentalement je demeure moi
même et en pleine possession de mes facultés… simplement j’ai quitté le
plancher des vaches pour m’envoler dans les airs, aux côtés, et au demeurant souvent
aux pieds, de ma complice du moment.

Ca dure quelques minutes, quelques heures… C’est comme une
ivresse, puis ça disparaît… Je crois que par nature c’est un moment circonscrit, limité
dans le temps…

Au fond je me rends compte que je vis ces moments de lâcher
prise comme une sorte de
catharsis… Et cette catharsis ne peut, par définition, qu’être limitée dans
le temps. Je ne pourrais plus m’épanouir dans le SM si je me retrouvais dans un
état de vénération permanente… ni de soumission permanente d’ailleurs…

Il y a eu pourtant des moments où je me suis surpris à penser que c’était
un état bien agréable, et que j’aimerais bien le vivre plus souvent, plus
longtemps… Et je l’aurais sans doute fait si j’avais rencontré une Dame qui aurait désiré de moi que je l’adore sur la durée… Mais au fond ce n’aurait été qu’une forme d’abandon… de soi … Au fond je sais bien que ce serait une erreur, et que ça deviendrait rapidement destructeur sur la
durée… Et aussi que j’en reviendrais rapidement, car où serait le plaisir alors ?

J’ai
eu la chance aussi d’avoir des complices qui avaient les pieds sur terre, et
qui ont su me recadrer quand je prenais un peu trop cette voie à leur goût. Et
je leur suis infiniment reconnaissant de l’avoir fait, c’est important d’être
bien entouré quand on se soumet, et j’ai beaucoup appris
à leur contact :-)

Celà dit il n’en demeure pas moins que oui, il est bien
agréable d’avoir de temps à autre une pensée pour une Demoiselle un peu
spéciale :-).

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